F comme Famille

Victime collatérale de mon chômage, mes proches subissent directement et indirectement les conséquences de ma périlleuse quête d’emploi :

–       ma mauvaise humeur quasi chronique, au point même de devenir l’un de mes nouveaux traits de caractère,

–       mes pseudos certitudes rabâchées sur les raisons de mes échecs,

–       mon introspection qui se confond parfois avec un certain nombrilisme (Cf N comme Nombrilisme )

–       ma prise de poids et mes cheveux gras.

Tout. Ma famille partage tout avec moi. Sauf peut être une seule chose : mon exceptionnelle bonne humeur. Rare et précieuse, je la réserve aux autres, bienveillants ou malveillants, auprès de qui je mets un point d’honneur à entretenir mon capital sympathie.

Pour ma famille, je ne fais aucun effort puisque tout est acquis depuis maintenant plus de 35 ans.

Je devrais pourtant les cajoler, les choyer, les préserver ne serait-ce que par reconnaissance car au-delà de leur patience et leur soutien, la plupart de mes proches ont contribué à mes indemnités. Mais rien à faire, je projette sur eux mes frustations, mes colères, mes angoisses en prenant toujours un soin particulier à ne jamais leur faire partager mes joies et mes espoirs … lesquels pourraient m’ôter le monopole de la colère.

N’y voyez aucun acharnement ni désamour pour eux mais sans collègue sur qui déverser ma haine je suis bien forcée de composer avec le seul public dont je dispose : ma famille, ma seule prise, parfois même ma seule cible.

Tout devient alors prétexte pour les faire culpabiliser sur ce qu’ils auraient dû faire ou être pour empêcher mon long séjour à Pôle emploi.

– A ma mère, je lui reproche … tout ! Et plus particulièrement son manque de soutienau spectacle de fin d’année quand j’étais en CM2, celui pour lequel j’avais imaginé la chorégraphie avec deux copines assez stupides pour me suivre dans cette représentation ridicule … Si seulement elle m’avait davantage renforcée narcissiquement tout aurait pu être différent. Une carrière se joue parfois à quelques détails près, si si …

– A ma sœur aînée, je lui reproche d’être la cadette et de m’avoir ainsi volé le premier rôle. J’ai lu beaucoup de théories socio-psycho-anthropologiques sur les traumatismes du cadet, et c’est fou comme on sous estime les conséquences sur l’affirmation de soi, si si …

– A mes défunts grands-parents, je leur reproche de m’avoir trop aimée, trop protégée de tout, surtout de moi même. C’est sans doute aussi de leur faute si je n’ai pas su être auto entrepreneur ni même entrepreneur tout court.

– A mon mari, je lui reproche d’être hyper actif au point de m’avoir fait deux enfants, et ce quasiment la même année et de me priver ainsi toute perspective de faire une belle et grande carrière !

– Enfin, à mes jeunes enfants, je leur reproche de sortir de l’école si tôt, trop tôt, pile au moment où me vient l’envie soudaine de rédiger mes lettres de motivation et d’entretenir mon réseau primaire, secondaire, tertiaire et plus… (Cf R comme réseau)

Oui tout est finalement de leur faute.

Tous mes proches qui me soutiennent,

Tous mes proches qui m’enveloppent …

Tous mes proches qui ne cessent de m’encourager…

…. Heureusement qu’ils sont là !

3 réflexions sur “F comme Famille

  1. Je sais que ce n’est pas le but de ton post (très bien écrit et très touchant) mais je reste persuadée que les enfants sont bel et bien une gêne pour une femme. Et que oui, la programmation familliale y est pour quelque chose dans nos destins individuels féminins qui pourtant se ressemblent. Alors oui, je comprends qu’il soit prioritaire de ne pas déverser sa rage sur sa famille mais tout de même; responsables mais pas coupables s’applique.

    • Ravie de débattre avec toi ( c’est aussi l’objectif de ce modeste blog). Je ne pense pas que ce soit la maternité qu’il faille remettre en cause mais plutôt sa perception dans notre société. Sans tomber dans les clichés maternels, mes enfants sont ma plus belle réussite et si j’ai mis ma carrière, un temps, entre parenthèse ça été un choix que je ne regrette absolument pas. En revanche, je suis navrée de voir que malgré de nombreux progrès et une relative autonomie, les femmes sont encore obligées de choisir entre leur carrière et leur famille …Sur le plan politique et culturel il y a encore tant de choses à faire pour faire évoluer les mentalités. Si le sujet t’intéresse, je te conseille le livre de Marlène Schiappa (fondatrice du blog maman travaille ) « Pas plus de 4 h de sommeil »

      • Bonjour et désolée de la réponse tardive.

        Je travaillais sur des illustrations; et après je voulais te trouver une citation de Doris Lessing sur la maternité; impossible à me remémorer ne serait ce que des mots clés. Et ce n’était peut être même pas Lessing mais un écrivain homme de la même période.

        Bref: tu as raison, on aurait du mal à remettre en cause la maternité; il faut bien se reproduire.
        Et évidemment changer la perception de la maternité c’est ce qu’il y’aurait de mieux dans les sociétés idéales. L’enfant se fait à deux, la responsabilisation doit se faire à deux.

        J’ai eu un débat assez houleux avec une fille qui me disait que quand le bébé crie, la mère avait un imparatif intérieur qui la faisait se précipiter, alors que l’homme non. Je remettais en doute cette ascertion, voyant autour de moi un paquet de pères se précipiter dès que leurs mômes se mettaient à brailler. Et elle a terminé par « tu ne peux pas comprendre, ça se voit que tu n’as pas d’enfant »; ce qui m’avait passablement irritée (trop facile de sortir de l’argumentation pour mettre en avant l’instinct…)

        Le roman a l’air drôle et assez universel; malheureusement pour moi je connais déjà assez bien la question…

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